La vague ahurissante de chaleur que la France a subie ces derniers jours a un effet non moins surprenant : des internautes s’en prennent aux météorologues, parfois violemment. Voir par exemple cet article de la Provence datant du 27 juin 2025.
S’en prendre au messager ne change rien à la réalité de ce qui nous arrive : le réchauffement climatique existe et les activités humaines en sont responsables. Les climatosceptiques n’entendent aucun argument de raison. Certains lisent beaucoup de textes allant dans leur sens pour se conforter dans leurs idées. Dans ce cas, est-il utile de chercher à ramener dans le vrai, dans ce que nous dit la science, celles et ceux qui s’enferrent dans des théories fumeuses selon lesquelles “c’est normal, la chaleur, c’est cyclique”, ” ben ouais, c’est l’été” ou bien le désormais fameux “c’était pareil en 76” ?(Non. J’y étais, j’avais 12 ans, j’habitais dans la même région et non, ce n’était pas pareil du tout).
La réalité, je pense, c’est que ces personnes repoussent des deux mains les études et les prévisions du GIEC et consorts tout simplement parce qu’ils sont morts de trouille. Parce qu’admettre que le monde dans lequel les plus anciens d’entre nous sont nés est perdu pour de bon, c’est impossible à entendre. Si on admet que le GIEC avait raison depuis 20 ans, et qu’on regarde la courbe des températures dans 20 ans, il y a de quoi être terrifié. Alors, la stratégie des climatosceptique consiste à mettre la tête dans le sable et à continuer “business as usual”.
Je ne suis pas en train de dire qu’il faut être défaitiste, mais lucide. Si je suis en danger immédiat, que dois-je faire ? Me mettre en boule, fermer les yeux et attendre que ça “passe tout seul parce que c’est cyclique”, ou bien évaluer le danger et tout faire pour sauver ma vie et celle de mes proches ?
Alors, il est certain que les chemins à emprunter pour limiter la casse climatique ne sont pas engageants à première vue : par exemple, diminuer drastiquement notre consommation de pétrole et de gaz aura de nombreuses conséquences sur nos modes de vie, directement liés à la structure de nos villes et l’omniprésence de la voiture. Arriverons-nous à cultiver autant de nourriture sous nos latitudes avec un climat devenu fou et en bannissant les pesticides qui tuent les abeilles, les riverains, et les agriculteurs ? Sommes-nous capables de rénover les passoires et bouilloires thermiques (souvent les mêmes bâtiments) alors que nos villes chouchoutent des centres historiques pas du tout adaptés à l’élévation des températures moyennes en France ? Sommes-nous capables d’arrêter de manger de la viande ? Et ce n’est qu’un bout du problème systémique, sûrement le plus important de l’histoire de l’humanité, que nous avons à régler. Je ne parle même pas de ce qui se passe à l’étranger…
Le 6ème rapport du GIEC souligne les avantages (pou la santé, la création d’emplois, pour l’équité) à entamer la transition écologique à l’échelle planétaire, mais comment arriver à faire bouger tous les pays du monde quand les plus puissants sont dirigés par des (insérer ici le qualificatif qui vous convient le mieux) et que d’autres subissent guerre et famines, ou ploient sous le joug de dictateurs ?
Je n’ai pas l’habitude de parler de politique sur ce blog, ce n’est pas son objet. Mais j’écris de la science-fiction, entre autres genres, et je commence à me dire que je devrais consacrer un roman à décrire un futur désirable, parce que c’est sûrement ce qui manque aujourd’hui dans le discours répandu dans les médias (tiens, je vous recommande la lecture de ce livre édifiant sur la conquête culturelle silencieuse en cours dans notre pays actuellement). Parler dans les médias “d’écologie punitive” aujourd’hui, je suis désolée, mais c’est criminel. Parce que vivre des étés à 40°C, c’est bien plus punitif que d’agir pour l’environnement et la biodiversité à laquelle, ne l’oublions pas, nous appartenons. Surtout que la hausse des températures n’est pas terminée, hélas.
Les récents reculs sur l’écologie votés au parlement démontrent un manque de courage politique effarant… tout ceci envoie des signaux désastreux à celles et ceux qui souffrent déjà des effets de la pollution punitive et du réchauffement qui va avec ! Nous ne sommes pas à l’abri dans notre confortable coin d’Europe. C’est déjà le cas de populations fragilisées dans les territoires ultramarins, ou dans plus de la moitié des pays du Sud et c’est en train d’arriver chez nous. Recul du trait de côte, orages dévastateurs, canicule, sécheresses fragilisant les maisons, cancers et autres maladies dus à la pollution et aux pesticides, températures en hausse qui causeront des morts sans aucun doute. Les mondes décrits dans les dystopies si à la mode sont bien en deça de la réalité qui nous attend. C’est ça qui sera punitif.
Il n’y aura pas d’humains ou d’animaux debout dans une France à 50°C. Les arbres mourront, et, in fine, nous aussi. Parce que notre organisme n’est pas fait pour ça. On ne s’adaptera pas, pas en si peu de temps. Ceux qui prétendent le contraire mentent. J’ai trouvé ces derniers jours des posts lunaires concernant les températures excessives dans les établissements scolaires : “Il faut que les enfants s’habituent”. N’importe quoi.
J’ai un érable dans mon jardin, je vous en ai mis un bout en photo, prise depuis la fenêtre de mon salon. Cet arbre est une bénédiction. Il a été planté à la construction de la maison dans les années 70. Il apporte une fraîcheur vraiment appréciable car il est situé côté ouest, là où le soleil tape le plus l’après-midi. Je veux que ce beau compagnon de vie survive, lui aussi.
Alors, moi, avec mon ordinateur (et toujours sans IA), je me demande si je ne vais pas travailler à un roman sur le sujet de la transition écologique. Je n’inventerai rien : bien des auteurs se sont attaqués à la question de “comment faire pour éviter la cata”, je pense à Kim Stanley Robinson et son Ministère du futur. Est-ce que les dirigeants de la planète l’ont lu et ont fondé un Ministère du futur en se disant (égoïstement) qu’ils allaient ainsi entrer dans l’Histoire comme les sauveurs de l’humanité et se faire ériger une statue ? Non, ils préfèrent s’envoyer des bombes, c’est finalement plus facile. Cela ne demande ni courage, ni intelligence, ni empathie. Et cela aggrave nos émissions de gaz à effet de serre, au passage, mais de cela les agresseurs s’en moquent comme de leurs premières victimes collatérales.
A quoi bon écrire encore sur l’écologie et la transition si personne ne veut lire de la “science-fiction punitive” ? Je rejoins toutefois l’idée d’autres auteurices (par exemple Charles Antoine Gautier dans ce carrousel Instagram : Allez le lire !) que la littérature est politique et indispensable, qu’elle peut donner des idées, faire réfléchir, apporter de l’espoir, et on en a bien besoin. Peut-être qu’à force de gueuler, ceux du fond finiront pas entendre.
Désolée pour ce post déprimant mais j’ai un peu de mal en ce moment à garder le moral.
Et vous, comment vivez-vous tout ça ?
Je finis ce billet avec une recommandation de podcast : https://podcasts.lemonde.fr/chaleur-humaine
Il est animé par le journaliste du Monde Nabil Wakim, et c’est une mine de connaissances (ses invités sont des spécialistes des différents sujets abordés), d’intelligence et d’espoir.
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