
Les Aventuriales fêtent cette année leur dixième édition. Quel bilan puis-je tirer de ces dix premières années de préparation et de festivals ?
- Dix ans de grandes joies et de fierté : de 1500 visiteurs la première année, alors que nous tablions sur 500, nous sommes passés au fil des années à 2500 visiteurs, curieux, motivés, et surtout fidèles.
Fierté aussi de la fidélité de nos exposants éditeurs : nombreux sont-ils, ceux qui viennent parfois de fort loin pour présenter leur travail et leurs collections, tous les ans. Nous avons vu arriver de nouveaux acteurs avec curiosité. D’autres ont dû interrompre leur activité, hélas. C’est un métier difficile et une de nos préoccupations reste de faire connaître leurs livres et leurs auteurs et autrices au plus grand nombre.
2020 : grâce à un dossier bétonné, de la foi (et à un peu de chance dans le calendrier), et une équipe formidable, les Aventuriales sont le seul salon de l’imaginaire ou presque à pouvoir tenir son édition l’année du Covid19. Les exposants et les auteurs nous applaudissent à la fin et franchement, on en a les larmes aux yeux. Et moi plus encore, qui venais de publier mon premier roman, Sous la lumière d’Hélios, repris depuis aux éditions du 38.
En 2021 : Les Aventuriales reçoivent le prix Sofia de l’engagement, une récompense dont nous sommes très fiers. Pour rappel, la Sofia soutient tous les ans plusieurs centaines de manifestations culturelles autour du livre.

En 2023 : les Aventuriales deviennent organisme d’intérêt général à caractère culturel, apte à recevoir des dons et à délivrer des attestations fiscales. Là aussi, ce fut la récompense du travail patient de notre président, qui devrait nous permettre de diversifier à l’avenir nos sources de financement.
- Dix ans de débrouillardise à toute épreuve : les Aventuriales ont démarré avec de tout petits moyens financiers, et le soutien logistique et indéfectible de la mairie de Ménétrol. Le reste, c’est de l’équipement prêté par les uns et les autres, de l’aide d’autres associations (merci les Mains Ouvertes), des copains qui viennent parfois de loin pour proposer matériel et compétence (merci Benj), et beaucoup d’enthousiasme. Une gestion prudente nous a permis petit à petit de sécuriser notre événement et de susciter l’attention d’organismes qui nous financent. Parce que, ne nous leurrons pas : difficile de faire vivre une manifestation culturelle (gratuite pour les visiteurs, je le rappelle) sans argent. Nous espérons que les baisses de subvention dans le monde de la culture ne vont pas se poursuivre à l’avenir. Nous remercions nos financeurs sans qui nous ne pourrions pas tenir longtemps, ainsi que les premiers donateurs privés qui se sont manifestés.
- Dix ans d’évolution de l’équipe : presque tous les postes ont changé de titulaire (sauf la trésorière, votre servante, toujours au poste dont, je crois bien, personne d’autre ne veut). Une équipe stabilisée demande du temps, des essais, des arrivées de nouvelles personnes, et d’autres qui partent. Les raisons des départs sont diverses : visions différentes, déménagement, vie personnelle trop prenante, santé, etc. En revanche, nous avons eu la chance de voir arriver au fil des années de nouveaux membres avec leur énergie, leurs envies, souvent des visiteurs et visiteuses devenus bénévoles (nous avons des bénévoles en or !!) et qui nous rejoignent ensuite de façon pérenne. Aujourd’hui, l’équipe est bien soudée. Sa taille modérée (une vingtaine de personnes) la rend souple, les décisions sont prises rapidement après concertation de tous ceux et celles qui souhaitent intervenir. Je trouve que nous travaillons bien ensemble, même si parfois des frictions se produisent, mais c’est normal, c’est humain.
De quasi strictement auvergnate, l’équipe est désormais nationale, avec des membres et ou des bénévoles dans de nombreuses régions hors ARA.
- Dix ans d’apprentissage : durant ces années, j’ai énormément appris, beaucoup râlé aussi (ah ! l’Administration ! ), mais je sais désormais inviter et rémunérer un auteur, un artiste, je sais ce qu’est le Guso, comment fonctionne l’Urssaf, comment rédiger un communiqué de presse, un dossier de presse, comment faire une déclaration à la Sacem, je sais modifier le bureau d’une association, je sais plein de choses sur le monde de l’édition, du livre, des librairies (ces derniers points sont liés aussi à mon activité d’autrice), je sais aussi comment et quand on prépare une demande de subvention, de paiement de subvention. J’ai appris ce qu’est la Sofia, le CNL, le SNE. Et ce n’est pas fini.
- Dix ans de citations célèbres : « On est large », « Je sers les Aventuriales et c’est ma joie », et le mythique « On verra le jour de l’install ». Plus récemment le « Louis a peut-être de la place chez lui » remporte un grand succès, et remplace peu à peu le triste « Nan, mais j’ai plus de place au garage, hein ». Assez fréquemment « On n’a plus de café » ou bien « on a trop acheté de croissants » s’invitent à la fête, ainsi que « C’est fou ce qu’on peut mettre dans un Kangoo ». « Il reste des marque-pages ? » « C’est pas vrai, j’ai encore perdu les ciseaux (le scotch, le marqueur bleu…)… » « Quelqu’un a vu yyy ? » sont des classiques aussi. Et enfin, citation d’un habitué des nombreuses tentations du salon : « J’ai plus de sous ». Et enfin « Faut demander à Louis d’amener son [insérer nom d’un matériel improbable] ». En dix ans, on a créé tout un monde de « private jokes ».
- Dix ans d’animations : ateliers d’écriture, de dessin, rencontres scolaires, jeux, spectacles, concerts, séances de cinéma, cosplay, démonstrations de combat, expositions artistiques, conférences, tables rondes, présentations de film, interventions à l’université, en maison d’arrêt, et même publication d’anthologies et formation en bibliothèque, nous avons fait -et faisons encore- plein de choses, diverses, ouvertes. Nous nous efforçons (à part pour le cinéma) d’offrir tout ceci gratuitement ce qui fait de notre festival un véritable acteur de médiation culturelle en matière d’imaginaire et de littérature. Merci aux associations qui se joignent à nous pour mener toutes ces actions, en particulier l’association de jeu de rôle Nemesis, l’association de jeux de plateau La Vache Carrée, les Mains Ouvertes, la médiathèque des Jardins de la culture de Riom, fidèles de la première heure ou presque.

- Dix ans d’évolution des outils : les premières Aventuriales, croyez-le ou non, se sont organisées à coup d’emails. Je crois que nous avons tous failli piquer notre crise à cause des 10, 15, 20 mails par jour qui s’accumulaient dans nos messageries entre 2014 et 2017. Petit à petit, nous avons simplifié et modernisé notre façon de faire. Discord, Google, etc sont nos amis, gratuits, et tout le monde en ressort plus serein. A noter qu’à l’instar des entreprises, les confinements Covid19 nous ont obligés à apprendre à travailler à distance, sur Zoom et autres bidules. C’est moins convivial (les réunions physiques sont moins nombreuses) mais plus souple.
- Dix ans de galères : il y en a eu, ne nous voilons pas la face. Depuis l’invité d’honneur qui loupe son avion, jusqu’au trains directs pour Paris qui ne circulent pas pile le week-end des Aventuriales, depuis la bénévole au pneu à plat le matin du salon, jusqu’à la tireuse à bière en panne de gaz, depuis le visiteur qui refuse de partir alors qu’on est en train de terminer de ranger et qu’on doit fermer la salle, jusqu’aux problèmes de santé d’un invité qui n’est pas en état de repartir après le salon et jusqu’aux accidents et maladies graves, on en a eu pas mal. On a eu aussi un problème d’hôtel à gérer en situation de crise un dimanche matin, des livres pas arrivés sur le salon (mais l’auteur, oui) et bien sûr la tenue du salon avec masques, jauge, sens de circulation en 2020. Mais bon, solidarité, réunions pour réfléchir ensemble, réactivité, nous ont aidés jusqu’à présent à tenir la route.
- Dix ans que je connais Lilian Ronchaud, le parrain des Aventuriales 2024 : sans lui, le festival n’existerait pas. Je l’ai connu en tant qu’éditeur de L’Ivrebook, alors que je faisais encore partie d’un forum d’écriture où nous préparions un annuaire des éditeurs de l’imaginaire. Je l’avais contacté pour recueillir les informations pour cet annuaire et nous avons déjeuné ensemble. Ce fut le début d’une belle amitié, je l’ai présenté à Jean-Pierre Fontana et le projet d’un salon du livre est né ainsi, entre 2014 et 2015 où a eu lieu la première édition. C’est Lilian qui a proposé de tenir les Aventuriales à Ménétrol et qui héberge encore aujourd’hui l’adresse de l’association. Il a cessé son activité d’éditeur mais c’est toujours un gros lecteur et Nathalie son épouse et lui-même sont un véritable soutien pour le festival. Alors, pour moi, c’est un bel anniversaire que celui de cette amitié-là.
Bon, si on m’avait dit en 2014 « tu en prends pour dix ans », j’aurais ricané (ou fui), à l’époque. Maintenant, je crois bien que je repartirai pour dix ans de plus, juste pour voir si quelques auteurs ou autrices chouchou viendront un jour en Terre du Milieu !
Reste à voir si notre dixième édition sera aussi réussie que les précédentes. Je l’espère, en tout cas, et j’espère bien vous y voir !
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