
Nous sommes en octobre, le mois de la mise en avant de la lutte contre le cancer du sein. J’ai participé à la course Clermont en rose, c’était un moment fort à partager avec les 4999 autres participant.e.s (quelques places avaient été réservées pour que des hommes, soutiens et alliés, courent aussi). J’avais besoin de me retrouver au milieu de cette foule, d’encourager celles qui peinaient plus que moi, de passer une ligne d’arrivée en larmes de joie.
Dans un autre genre d’action, je me suis lancée depuis quelques jours dans des travaux de couture, en particulier des coussins-coeur qui sont précieux pour les opérées afin de soulager les douleurs post-opératoires. J’en ai encore cinq à finir avant de tout apporter au Centre de lutte contre le cancer de ma ville.
Je suis très débutante dans cet artisanat, mais je trouve qu’il vaut mieux essayer et réussir à peu près que ne pas tenter le coup du tout.
C’est drôle, en écriture, c’est la même chose. Rester un wanabee toute sa vie parce qu’on vise la perfection immédiate ne permet pas d’écrire la moindre ligne.
Avant de me lancer, je pensais que l’on ne cousait vraiment que lorsqu’on était à sa machine à coudre, que les pièces s’assemblaient, que l’ouvrage commençait à ressembler à quelque chose. Là, oui, cela méritait le nom de couture.
En fait, c’est complètement faux. J’en ai discuté avec une amie récemment et elle me rejoint sur ce point : dès qu’on choisit le tissu, dès qu’on réfléchit simplement à son projet, on est déjà en train de coudre. Le moment où on va découper le patron, le fixer sur le tissu, et tout laisser en plan parce qu’on n’a pas le temps de finir n’est pas un moment de frustration : c’est un travail en cours. Un travail qui deviendra une pièce terminée d’un seul coup, comme des grains de maïs deviennent du pop-corn.
En écriture, c’est pareil. Si je réfléchis à mon prochain opus, si je note des idées, si je travaille mon synopsis et sais très bien qu’il sera revu dix fois avant d’être bon, c’est déjà de l’écriture. Le moment où je tape le mot “Fin” n’est qu’une étape. Avant, j’étais déjà écrivain. Je le serai encore lorsque je corrigerai, puis recorrigerai, puis re-re-recorrigerai.
Même si le texte n’est pas fini, pas parfait, pas publié. On est déjà écrivain, couturier, peintre, quand on essaie, qu’on se trompe, qu’on recommence. L’effet pop-corn de la publication ne fait pas de vous un écrivain de façon brutale, vous l’étiez avant.
Même si je ne suis qu’une débutante, je couds déjà.
Je suis contente d’avoir pris du temps pour confectionner de mon mieux ces coussins. Parce que d’autres personnes, il y a deux ans, ont cousu bénévolement un coussin que j’ai reçu lorsque j’étais malade, et que j’ai donné à une autre personne malade après ma guérison.
Je ne suis pas sûre que mes écrits créent autant de lien, soient aussi utiles socialement, que ces modestes pièces de couture.
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