La fin d’un cycle

J’y songeais cette semaine, profondément attristée et choquée par l’annonce parue dans Actualitté ici https://actualitte.com/article/106712/politique-publique/les-imaginales-doivent-evoluer-pour-preparer-demain-stephane-wieser.

J’y songeais, donc : deux choses m’ont permis de me construire en tant qu’écrivaine : CoCyclics et les Imaginales.

J’ai connu les deux la même année, 2012. Et cela a changé ma vie.

2012, une triste année, autant d’un point de vue familial (des proches gravement malades) que professionnel (mise au placard). Heureusement que dans mon couple et avec mes enfants, tout allait bien… Je me suis dit à l’époque « tout part en cacahuète, tu es épuisée, tu vas finir en dépression à ce rythme-là. Qu’est-ce qui pourrait te remonter le moral ? » Et la réponse est venue d’elle-même, comme une évidence : « Me mettre enfin à écrire sérieusement et être publiée ». J’ai relevé ce défi personnel qui me semblait inaccessible, en me demandant ce qui me manquait pour y arriver. J’ai vite trouvé les réponses :

1 ) j’avais besoin d’aide pour améliorer mes textes, il me fallait donc des bêta-lecteurs, attirés comme moi par les littératures de l’imaginaire. Impossible de faire appel à quelqu’un d’hermétique à la notion de magie, d’entité monstrueuse ou de monde parallèle… il ne suffit pas d’aimer lire pour être un bon bêta-lecteur.

2) je ne connaissais personne dans le milieu et je devais me construire un réseau professionnel. Je comprenais qu’envoyer un texte à un éditeur en étant une parfaite inconnue revenait à lancer une bouteille à la mer en espérant une réponse sous quinzaine.

Les premiers, je les ai trouvés sur CoCyclics : c’est là où j’ai appris à travailler mes écrits, en bêta-lisant les autres auteurs et en recevant des bêta-lectures. J’y ai aussi fait connaissance de la plupart de mes amis et amies dans ce monde de l’écriture. Pendant des années, j’en ai parlé comme de ma deuxième famille.

Pour le réseau, Google m’a informée que l’un des plus gros salons de l’imaginaire en France était les Imaginales. « Mazette, Epinal, c’est où… au moins 6 heures de route, ça a intérêt à être bien ». J’en ai parlé à Lémuri que ça tentait bien. Allez, on pose des congés, on trouve un hôtel, et c’est parti.

Ce fut plus que bien. Les Imaginales : une immense pâtisserie de livres, un laboratoire d’idées, un bouillonnement où se croisaient auteurs, lecteurs, éditeurs… et où, au fil des années, j’ai appris à connaître pas mal de monde, en m’intéressant à leur travail et en proposant le mien. Je m’y suis formée (merci la journée de formation animée par Jean-Claude Dunyach et Lionel Davoust), je me suis confrontée au monde de l’édition (merci la rencontre auteurs/éditeurs « en un lieu secret »), j’y ai aussi laissé pas mal de sous tous les ans en explorant les publications des petites maisons et en discutant avec les auteurs invités.

J’ai constaté que la francophonie recelait des trésors d’inventivité et de talent dans les littératures de l’imaginaire.

J’ai vu que de nombreuses femmes francophones écrivaient de la science-fiction, mon genre préféré. Et du fantastique, et de la fantasy.

Je suis allée discuter avec Christopher Priest !

J’ai découvert un monde.

Année après année, aller au Imaginales, c’était une fête annuelle, un moment hors du temps, de retrouvailles et de découvertes. Et d’ouverture vers la diversité de nos sociétés au travers de tables rondes passionnantes.

Tout ça, grâce à l’énergie, la passion, la vision aussi, de sa directrice artistique, Stéphanie Nicot, épaulée par une équipe de premier plan.

Durant des années, ces deux piliers de ma créativité, le forum et ce festival, m’ont permis de me sentir légitime à écrire, puis à me lancer avec l’équipe des Aventuriales pour l’organisation de notre propre salon.

J’ai quitté CoCyclics il y a deux ans. Il était temps pour moi de laisser ce berceau où je ne trouvais plus ma place. On ne passe pas toute sa vie dans son berceau, d’ailleurs.

Et je ne retournerai plus à Epinal. Les Imaginales sans Stéphanie Nicot, son énergie et sa vision, je ne vois pas trop ce que cela peut devenir. D’ailleurs, voici une interview édifiante de l’intéressée, parue sur le site d’ActuSf, qui vous donnera une idée de la manière dont la directrice artistique d’un des plus gros salons littéraires de France a été débarquée après 20 années de service, et dans quelles conditions elle a travaillé depuis tout ce temps.

https://www.actusf.com/detail-d-un-article/imaginales-st%C3%A9phanie-nicot-revient-sur-son-%C3%A9viction

2022 : la fin d’un cycle pour moi. Heureusement, j’ai gardé un réseau de connaissances et d’amis, et il y a d’autres salons en France.

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